Suite à la condamnation de son frère, Liu Xia adresse une lettre ouverte au président Xi Jinping

Le 14 juin 2013, l’avocat de a posté sur Twitter une lettre ouverte adressée au président Xi Jinping, par sa cliente. Celle dont l’époux purge depuis 2009 une peine de 11 ans de prison pour “subversion” est elle-même assignée à résidence depuis que s’est vu décerner le prix Nobel de la paix en octobre 2010. Signe de l’acharnement des autorités chinoises à faire pression sur les familles de dissidents, son frère, , a récemment été condamné à 11 ans de prison pour “fraude immobilière”.

“La condamnation du beau-frère de Liu Xiaobo à une peine aussi lourde montre une nouvelle fois l’acharnement des autorités contre les proches des dissidents. Non contente d’être le seul pays au monde à détenir un lauréat du prix Nobel de la paix en dépit des nombreux appels internationaux à sa libération, la Chine s’obstine à intimider et réprimer ses proches, n’hésitant pas à bafouer ses propres lois nationales”, a déclaré Reporters sans frontières.

“Malgré le grand courage dont elle fait preuve en continuant de dénoncer les abus du régime de Pékin, Liu Xia a besoin de pouvoir compter sur le soutien des instances internationales et des gouvernements étrangers. Ceux-ci doivent sortir de leur silence, et contraindre la Chine à libérer Liu Xiaobo, Liu Hui, Liu Xia, ainsi que tous les journalistes et net-citoyens actuellement détenus dans les geôles chinoises”, a ajouté l’organisation.

Le 9 juin 2013, son frère, Liu Hui, a été condamné par la cour de Huairou à onze ans de réclusion, assortis de 20 000 yuans d’amende (environ 2 000 euros), et de deux ans de privation de ses droits politiques. Liu Hui est accusé d’avoir participé à une fraude immobilière massive, dont le préjudice a été estimé à près de 3 millions de yuans.

Les représentants d’une dizaine de pays, parmi lesquels les États-Unis, et ceux de l’Union européenne, ainsi que des journalistes étrangers, se sont vus refuser la possibilité d’assister à l’audience. Autorisée à se rendre au procès, Liu Xia a qualifié le verdict de la Cour “d’injuste” et de “persécution politique”, remettant ouvertement en cause les pouvoirs de l’appareil judiciaire, et appelant au respect des droits des accusés. Président Xi Jinping,

Je suis Liu Xia, citoyenne de la République populaire de Chine. Depuis le mois d’octobre 2010, je ne jouis plus d’aucune liberté individuelle, ayant été placée en résidence surveillée. Personne ne m’a indiqué les raisons de cette assignation à résidence. J’en arrive à me dire que peut-être, dans ce pays, être l’épouse de Liu Xiaobo constitue un “crime”.

Je trouve complètement injuste le verdict rendu le 9 juin 2013 à l’encontre de mon frère cadet Liu Hui. Je m’interroge sérieusement sur la légitimité de l’appareil judiciaire, et même du gouvernement dans son ensemble.

Dans un État de droit, nous devrions voir les autorités du pays rendre la justice et non s’adonner à une répression sans merci fondée sur la violence. Chaque cas de privation des droits individuels peut conduire à une tragédie, recouvrant ainsi d’une ombre lugubre l’auréole de légitimité des autorités.

La justice pénale ne se révèle réellement qu’à travers les affaires judiciaires dont elle s’occupe. Dans ce cas précis, je ne peux me figurer que la justice que nous espérons puisse s’accomplir alors que les droits de l’accusé sont ignorés et même méprisés.

Monsieur le Président, le “rêve chinois” que vous avez évoqué ne se concrétisera qu’à travers la réalisation du rêve de chaque citoyen. J’espère que ce rêve chinois ne deviendra pas pour moi, comme pour ces citoyens, un “cauchemar chinois”.

Aujourd’hui est le jour du festival traditionnel chinois des bateaux dragons. Pouvez-vous imaginer dans quel état d’esprit notre famille passe ce moment ?
Liu Xia, citoyenne