Mal de dos chronique : optez pour la rééducation !

Votre mal de dos ne cesse de réapparaître et la douleur transforme votre quotidien en un véritable enfer… Lorsque les traitements conventionnels démontrent leurs limites, quelle est la meilleure solution ? Doit-on opter pour la chirurgie ou la rééducation ? La réponse avec le Dr Philippe Guidon, médecin spécialiste en chirurgie orthopédique et rééducation.

La prise en charge des lombalgies chroniques est un véritable défi pour les médecins. Lorsque les médicaments ne suffisent plus, quels sont les derniers recours ?
Un problème de santé publique, à ne pas négliger
Selon un sondage, 27 % des hommes et 36 % des femmes ressentent régulièrement des douleurs dorsales (1). Pour certains d’entre eux, la douleur devient chronique et altère considérablement leur qualité de vie. On parle de lombalgie chronique, lorsque les douleurs du dos durent plus de trois mois. Face à ce trouble, la prise en charge relève parfois du casse-tête. “Ces patients ont généralement essayé les traitements conventionnels sans grand résultat. Et c’est après trois à six mois, que les patients sont orientés vers des spécialistes par leurs médecins généralistes. Un délai encore long…“ nous précise le Dr Philippe Guidon spécialiste en chirurgie orthopédique, médecine physique et ostéopathie à Marseille.
Par sa fréquence, la lombalgie chronique constitue une charge économique importante pour les malades et le système de santé dans son ensemble. Le coût direct des lombalgies en France était, il y a dix ans, de 1,5 à 2 milliards d’euros par an, dont 500 millions d’euros pour les indemnités journalières liées aux arrêts de travail (2). Autant dire que déterminer la meilleure prise en charge est un véritable enjeu de santé publique.
Chirurgie ou rééducation : une efficacité comparable
Des chercheurs anglais ont comparé l’efficacité de la chirurgie et d’un programme de rééducation intensive (3). Ils ont ainsi recruté 349 patients dans des établissements britanniques spécialisés en orthopédie et en rééducation. Souffrant depuis plus d’un an, tous étaient candidats à une opération, baptisée arthrodèse qui consiste à souder deux articulations et ainsi les rendre indolores. La moitié des participants a été opérée, tandis que l’autre moitié suivait un programme de rééducation intensive. Pour ce dernier groupe, la prise en charge reposait sur des exercices de renforcement musculaire, de stabilisation de la colonne, d’endurance cardiovasculaire, des étirements ainsi qu’une prise en charge cognitivo-comportementale.
Après deux ans, tous les malades ont vu leur situation s’améliorer. A part un handicap légèrement moins important chez les patients opérés, aucune différence n’a été observée sur la perception de la douleur, la vitesse et l’endurance lors d’un test de marche… De plus, face aux risques supplémentaires liés à la chirurgie, les médecins estiment que les différences entre les deux groupes sont marginales. Les patients candidats à une arthrodèse peuvent espérer une amélioration de leur santé comparable avec une rééducation.
“Cette étude confirme la place très limitée de la chirurgie face aux lombalgies chroniques, en dehors de cas très particuliers. La principale indication est due à la compression d’un nerf ou de la moelle épinière par des excroissances arthrosiques (ostéophytes plus connus sous le nom de becs de perroquet). Ces problèmes peuvent occasionner un rétrécissement du canal lombaire chez les personnes âgées qui souffrent alors d’une faiblesse des jambes lors de la marche“ nous précise le Dr Guidon “L’indication de la chirurgie face à des scolioses lombaire évolutive chez la personne âgée, à des spondylolyses ou une hernie discale évoluant vers une sciatique restent plus discutables. Dans ces cas, les résultats de la rééducation sont généralement aussi bons“.
Des conclusions en accord avec les recommandations de la Haute autorité de santé pour laquelle “il n’y a pas d’étude attestant de l’intérêt éventuel de l’arthrodèse dans la lombalgie chronique isolée“ (4).
Un coût deux fois plus élevé pour la chirurgie
Les chercheurs anglais ont également conduit une analyse économique des deux types de prise en charge (5). Le total des soins dispensés durant les deux ans de suivi est près de deux fois plus élevé dans le groupe des «opérés » que chez les patients ayant suivi une rééducation. Encore un argument qui plaide en faveur de cette dernière forme de prise en charge.
Pour le Dr Guidon, il n’y a pas de solution miracle : “La rééducation est un travail de longue haleine qui nécessite un investissement du médecin mais surtout du patient. C’est sur la bonne entente et la confiance mutuelle de ce “couple“ que repose le succès de ce traitement“
En conclusion, l’arthrodèse est une opération irréversible, comportant comme toute chirurgie des risques. Par ailleurs, l’absence de véritables avantages par rapport à la rééducation (sauf cas particuliers) lui confère une place très limitée dans le traitement des lombalgies chroniques. En cas de douleurs résistantes, la meilleure solution reste un programme de rééducation intensive, dans lequel le patient devient le propre acteur de sa prise en charge.
David Bême
1 – Sondage CSA/SPQR Le Parisien, 24/05/20002 – Borgès Da Silva Ge., Borgès Da Silva Gi., Fender P., Allemand H. “Quelques repères médico-socio-économiques sur les lombalgies“. Numéro Spécial Le Concours Médical, n°39,2/12/2003 – BMJ 2005 ;330 :1233-94 – Diagnostic, prise en charge et suivi des malades atteints de lombalgie chronique – Anaes – décembre 2000
5 – BMJ 2005 ;330 :1239-1244
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Un livre pour aller plus loin
Le Dr Philippe Guidon est l’auteur de “Mal de dos“ – Larousse – Guides santé – 144 pages – 9,50 €