Reporters sans frontières s’inquiète du climat délétère dans lequel les journalistes libyens sont contraints d’exercer leur profession. Un climat marqué par l’absence totale de sécurité et un manque patent d’Etat de droit. L’organisation appelle les autorités à ne pas laisser impunies les graves exactions récemment recensées.
Le 29 septembre dernier, vers 8 heures du matin, les locaux de Radio Zawiya, dans la ville de Zawiya, ont été la cible de plusieurs coups de feux, occasionnant des dégâts matériels. Personne n’a été blessé, mais le bureau de son directeur a été endommagé.
Le 27 septembre, , rédacteur en chef du journal zintani Al-Rawasi, a été attaqué par un groupe armé alors qu’il se trouvait à bord de son véhicule sur la route de Swani, en direction de la ville de Zintan en compagnie de sa femme, sa fille et son frère. Les hommes armés ont tiré à plusieurs reprises sur la voiture d’Al-Turki, blessant le journaliste à la jambe, ainsi que son frère, qui a succombé aux balles quelques heures après avoir été transporté à l’hôpital. Le rédacteur en chef a ensuite été kidnappé, laissant sa famille sans aucune nouvelle de lui jusqu’à ce jour.
, un jeune journaliste freelance qui collabore avec différents médias locaux et internationaux, a été arrêté le 23 septembre dernier par une patrouille de police dans le quartier d’Al-Hadba à Tripoli. Il était apparemment recherché par les forces militaires. Les policiers l’ont menotté et lui ont bandé les yeux avant de l’emmener vers une prison pour y être questionné. Son arrestation arbitraire serait liée à une interview téléphonique accordée à la chaîne satellitaire privée Al-Assima la veille au soir. Il y avait critiqué le gouvernement d’Ali Zeidan, les Frères musulmans libyens et l’influence néfaste des milices armées, qu’il rendait responsables du manque de sécurité en Libye. Son intervention concernait notamment l’enlèvement par un gang armé de l’activiste Azzedin Louehshi quelques jours auparavant, alors qu’il participait à une manifestation sur la Place des Martyrs dans la capitale libyenne. Lors de son incarcération, Ahmed Abdel Hakim a été soumis à de fortes pressions et prié de téléphoner à différentes chaînes libyennes pour réfuter ce qu’il avait déclaré précédemment – chose qu’il a refusé de faire jusqu’à sa libération le lendemain matin. Le journaliste freelance continue de recevoir des messages d’intimidation et des menaces de mort.
Quelques jours plus tôt, le 14 septembre 2013, , journaliste indépendant, collaborateur du journal Shuruq Libya et de l’agence de presse Tadamoun, a été enlevé vers 17 heures 30, près de la Place des Martyrs. Il a été arrêté à un checkpoint militaire pour un contrôle d’identité. Après avoir décliné sa condition de journaliste, Mohammed Al-Hashim a été conduit dans une prison secrète où il a fait l’objet d’actes de torture pendant près de douze heures : des décharges électriques, des coups de fouets et des brûlures de cigarettes lui ont été administrés. Mohammed Al-Hashim a été forcé de confesser sous la torture qu’il avait fait partie de l’ancien régime – accusation qu’il réfute catégoriquement. Le journaliste n’a été relâché que quatre jours après, le 18 septembre.
A la fin du mois d’août dernier, le quotidien Libya Al-Jadida avait vu ses locaux mis à sac un vendredi matin, jour de congés en Libye, par un groupe armé. Du matériel, et notamment plusieurs ordinateurs, avaient été volés. Le directeur exécutif du journal,, et le rédacteur en chef, , avaient auparavant reçu de nombreuses menaces à l’encontre de leurs personnes et de leurs familles.
Reporters sans frontières rappelle que la nouvelle Libye est soumise à des obligations nationales et internationales en termes de liberté d’expression et d’information. L’organisation exhorte les autorités libyennes à déployer toutes les mesures nécessaires permettant aux journalistes d’exercer leur métier en toute sécurité. Les autorités doivent faire tout ce qui est en leur pouvoir pour qu’enlèvements, menaces et attaques à l’encontre des professionnels des médias soient endigués le plus rapidement possible. Elles doivent poursuivre les auteurs de ces actes devant la justice afin de mettre un terme à l’impunité et au cycle de violences qui s’abattent sur les professionnels de l’information.