Reporters sans frontières condamne avec la plus grande fermeté les exactions commises par le groupe jihadiste ISIS (l’Etat islamique en Irak et au Levant) à l’encontre des médias et des professionnels de l’information en Irak et dans les territoires syriens dits “libérés”.
”Reporters sans frontières est tout aussi inquiète que révoltée face à la multiplication des attaques perpétrées par ISIS à l’encontre des professionnels de l’information en Irak et en Syrie. Ce groupe jihadiste, qui cherche par tous les moyens à contrôler la diffusion de l’information, vise systématiquement les journalistes et les médias qui ne partagent pas son idéologie. Menaces, enlèvements, tortures, assassinats, rien n’est écarté pour faire régner la terreur. En Syrie, où la collecte et la diffusion de l’information sont des tâches de plus en plus dangereuses, les médias locaux jouent un rôle crucial. Ils sont désormais presque les seuls à pouvoir nous tenir informés des évènements dans le pays. Les attaques contre ces médias constituent donc de véritabes crimes à l’encontre de la liberté de l’information. Nous condamnons fermement les exactions et les crimes commis par ce groupe armé,” a déclaré l’organisation.
Dans un communiqué diffusé sur plusieurs sites jihadistes le 23 décembre 2013, ISIS revendique l’attaque des locaux de la chaîne de télévision Salaheddine qui a eu lieu à Tikrit (au nord de Bagdad) le jour même et qui a coûté la vie à cinq employés. Le communiqué affirmait que la chaîne visée diffusait des informations mensongères et une image erronée de la communauté sunnite et détaillait les conditions dans lesquelles s’est déroulée l’attaque.
Dans les régions qu’il contrôle en Syrie, ISIS mène des actions tout aussi violentes et répressives à l’encontre des acteurs des médias. Dans son rapport intitulé Le journalisme en Syrie, une mission impossible? publié le 6 novembre 2013, Reporters sans frontières avait souligné qu’ISIS devenait une des principales menaces pour la liberté de l’information.
Le groupe serait ainsi responsable de l’assassinat de plusieurs journalistes,
mais aussi de l’interdiction de diffusion de certains médias jugés “impies”. Le 24 décembre 2013, des combattants d’ISIS ont ainsi empêché la distribution dans Raqqa, au nord du pays, de deux magazines Tlena Al-Huriya et Al-Ghirbal et en auraient brûlé des exemplaires.
ISIS a également mis à sac plusieurs locaux de médias et procédé à plus d’une dizaine d’enlèvements de journalistes syriens et étrangers.Cette pratique s’est accentuée de façon inquiétante au cours de ces derniers jours. Pas moins de cinq médias syriens ont été attaqués. Ainsi, le 26 décembre 2013, des membres d’ISIS ont attaqué les locaux de la chaîne Shada Al-Huriya TV, proche de l’opposition avant d’enlever cinq de ses employés:, , , et . Cette attaque est intervenue quelques jours après la diffusion par la chaîne d’une interview d’Adnan Al-Araour, un célébre prédicateur salafi, dans laquelle il accusait le groupe de trahison et de meurtre.
Dans la nuit du 27 décembre, les combattants d’ISIS ont pris d’assaut le bureau commun à Shahba Press et Hanano News Network situé à Alep dans le quartier de Hanano. Après avoir, mis à sac les locaux, ils ont réquisitionné la totalité des équipements de ces médias et kidnappé le reporter qui travaillait depuis plus d’un an pour ces deux médias. Cette agression a eu lieu à quelques mètres du quartier général de la police révolutionnaire sans que celle-ci n’intervienne.
Le 28 décembre, le groupe s’en est pris aux locaux de deux autres médias : Fresh FM radio, et le bureau de presse de l’Administration de Kafranbel à Kafranbel dans la province d’Idlib. Lors de leur raid, ils ont à nouveau pillé la totalité de l’équipement dont disposaient ces médias. Ils ont aussi enlevé six citoyen-journalistes : , libérés le jour suivant.
A l’instar de Jabhat Al-Nosra, ISIS est en passe de rejoindre la liste des prédateurs de la liberté de l’information établie chaque année par Reporters sans frontières .