Manuel Valls: entre fierté catalane et fidélité partisane

Manuel Valls et Martine Aubry ont sorti les gants de boxe. Mais à mesure que les uns et les autres choisissent leur camp, la stratégie de ce chef de file des « quadras » du PS est de plus en plus floue. Tout en crachant dans la soupe, Manuel Valls a promis de rester «fidèle à son poste», mais a-t-il vraiment un avenir au PS ? Avec 2012 en ligne de mire, le Catalan ne risque-t-il pas de lasser à force de ruer dans les brancards?

«Il faut vite oublier cette histoire»: certains cadres du Parti Socialiste trouvent la polémique qui enfle autour des échanges de lettres entre Martine Aubry et Manuel Valls plus que gênante. Harlem Desir, Claude Bartolone et Laurent Fabius, approuvent quant à eux la réaction de la première secrétaire qui montre qu’il y a «un pilote dans l’avion»… Jean-Marc Ayrault, le chef du groupe socialiste à l’Assemblée nationale trouve judicieux de mettre fin aux batailles d’égos…
Mais le principal intéressé, Manuel Valls, n’est pas descendu de ses grands chevaux. Avec l’impulsivité qui le caractérise -due à ses racines catalanes?- le député de l’Essonne répond cash, par courrier, à la missive en forme d’ultimatum de la boss du PS : «ton procès d’intention relève au mieux de la désinformation, au pire de l’insulte»…Il poursuit: «C’est quand même incroyable! … Je n’y vois pas un problème personnel mais un symptôme de l’état de crise du PS ».
C’est lui qui le dit. Ailleurs que chez les Roses, jamais on n’aurait entendu l’une des têtes d’affiches dire que le Parti «dévore ses enfants», qu’il faut «tout changer», que le mot même de «socialisme» est dépassé, que la génération précédente « a failli ».

Pourtant déjà rappelé à l’ordre par ses amis, comme Jean Glavany: «fais attention, tu tapes plus fort sur le PS que sur Sarkozy.», le député-maire d’Evry continue de faire des vagues. Tant qu’il n’y aura pas d’assainissement des troupes, tant qu’il n’aura pas mis fin à certaines pratiques, le jeune loup continuera sa chasse aux éléphants.

Pour certains analystes politiques, Manuel Valls «croit que son heure est venue. Quand il n’y a pas de réel leader, tout le monde croit qu’il peut le devenir. On est en pleine période de gonflement des égos.»

Manuel Valls ne perd pas de temps. Sa candidature en 2012, il n’y pense plus seulement en se rasant. Il y a un peu plus d’un mois, il annonçait qu’il serait de la course à l’investiture socialiste. Tout en se défendant de vouloir «écraser tout le monde». Vraiment?

Mais le jeune loup de 46 ans est-il prêt? Il a beau dire qu’il n’est pas le seul à vouloir «changer profondément le parti», et montrer sur son Blackberry tous les textos de soutien qu’il a reçus, de la part de Gérard Collomb, Aurélie Filippetti, Pascal Terrasse, Gaëtan Gorce… C’est un peu léger pour continuer sa route. Et à trop cracher dans la soupe, Manuel Valls pourrait bien dégoûter les seuls soutiens qu’il a pu séduire.

Alors il fait cavalier seul. Après avoir été dans l’ombre de Michel Rocard, puis de Lionel Jospin, « il s’est d’ailleurs promis de ne jamais plus entrer dans une relation de fidélité, d’admiration et de respect vis-à-vis d’un leader ». Il prévoit de sillonner la France cet été, de lancer un site internet en septembre, et de sortir un nouveau livre en novembre. Un autre. Peu après la publication de son dernier opus, intitulé Pour En Finir Avec Le Vieux Socialisme, et la création de son mouvement «Gauche optimiste».

Rien ne semble pouvoir l’arrêter…”Optimiste”, c’est peut-être la meilleure façon de décrire ce social-libéral décrié pour sa prétendue «sarkocompatibilié». Oui, il s’y voit déjà et ne s’en cache pas. Mais celui que l’on dit un peu rigide et incapable de compromissions, devra bien mettre un peu d’eau dans son vin et jouer collectif.

C.C.

Jeudi 16 juillet 2009